La baie de Somme
Sortie du 17 11 2025
5h30. Condette dort encore, mais pas le club photo Image Opale. Dans le clair-obscur du parking, les silhouettes se découpent une à une : Jean-Claude, Jean-François, Laurent, Philippe et Alain. Regards encore embrumés, trépieds sur l’épaule, thermos dans le sac… et cette excitation discrète que seuls connaissent ceux qui vont traquer la lumière avant qu’elle ne naisse.
La route s’élance sous la pluie. Fine, insistante. De quoi semer un doute glacé dans les esprits : et si la Baie nous boudait ce matin ? Le ciel semble vouloir tester la détermination du groupe. Spoiler : il perdra.
6h36. Parking du Marquenterre. Miracle ornitho-météorologique : la pluie a cessé. Le froid, lui, est bien là, piquant les joues et engourdissant les doigts — ce froid “friquet” qui vous rappelle que la nature ne se photographie pas depuis un canapé. Bottes ou pas bottes ? Le débat est bref, pragmatique, presque philosophique. Finalement, chacun s’équipe, prêt à en découdre avec la Baie.
Philippe sort l’arme secrète : le café. Noir, fumant, fraternel. À cet instant précis, la température remonte de quelques degrés… dans les cœurs.
Une demi-heure de marche plus tard, nous y sommes. La Baie de Somme s’ouvre devant nous comme un théâtre silencieux. Les premières lueurs du jour griffent l’horizon. Les nuages, encore ensommeillés, se parent de roses, d’orangés, de gris bleutés. Les appareils photo frémissent. Les regards aussi.
Le silence est total, presque religieux. Chacun scrute. On espère le spectaculaire : un sanglier furtif, un mouflon improbable, les premiers vols lourds de canards, les silhouettes élégantes des cygnes, la blancheur éclatante des aigrettes. Le regard glisse sans cesse vers le ciel. Le long du parc du Marquenterre, l’imagination s’emballe. Après tout, quelques photos de Pygargue à queue blanche ont récemment circulé sur les réseaux… Et si ?
Non. Pas aujourd’hui. Le seigneur des airs a décidé de garder son mystère intact. Ce sera pour une autre fois — et c’est aussi ça, la magie.
La marée monte lentement, inexorable. Puis soudain, le spectacle commence. Les premiers nuages de limicoles surgissent, mouvants, vivants, presque irréels. Un ballet hypnotique, un murmure d’ailes, une fresque animée un peu trop lointaine pour les capteurs… frustration douce-amère du photographe, vite balayée par l’émotion brute de l’instant.
Le retour se fait sans hâte. Comme pour nous raccompagner, quelques Tariers pâtres jaillissent des haies, des Bruants ponctuent le chemin de leurs silhouettes discrètes. De petits cadeaux d’adieu, offerts par la Baie à ceux qui ont su se lever tôt et accepter le froid.
Retour à Condette. Les cartes mémoire sont peut-être modestes, mais les souvenirs, eux, sont pleins à ras bord.
Une matinée froide, oui.
Mais surtout une très belle matinée.
Bonjour
Bravo pour ce reportage, magnifiques images et félicitations pour la rédaction du texte. Au plaisir de vous suivre…
Pour faire court, vous êtes bons
Merci pour ce commentaire qui nous touche. Au plaisir de vous rencontrer qui sait sur un spot, voire mieux, à notre club.